C'est une question intéressante. Une question que je m'étais posée il y a de cela plusieurs mois et ce n'est que maintenant que j'ai la force de mettre à plat la réponse à cette question. Mais détrompez vous, ce texte ne sera jamais divulgué au grand public. Ce secret est trop lourd pour mes fragiles épaules, alors je le concède à quiconque lira ce récit. Si tout de même vous continuez à lire ce texte alors vous deviendrez possesseur de ce secret, ou plutôt de cette malédiction. N'oubliez pas. Les cadavres ne sont jamais vraiment morts.
Maintenant, que les prémices sont terminées et que vous avez décidé de détruire le peu de santé mentale que vous avez pu conserver jusqu'à présent, commençons. Cette fameuse question, donc, m'est apparue il y a déjà de cela 3 mois dans un ennui innocent et dans un exercice de pensée assez niais. Ce jour-là, personne n'avait besoin de moi et Adler m'avait congédiée, récompense de mon bon et loyal travail. Je m'assoupis sur le bureau près de ma Machine bien-aimée et me décida de faire des recherches sur ce sujet. Et rien, pas un mot, pas un titre, pas une donnée. Rien n'indiquait de réponse sur la seconde vie des morts des Backrooms, personne ne se demandait où les restes des morts abandonnés pouvaient-ils finir ? Même les Screamers n'avaient laissé aucune information à ce sujet, même si j'eu un doute sur le fait que la conception de vie et de mort soit la même pour eux. Je divague.
Vous conviendrez tous, chers lecteurs, que lorsque vous pénétrez dans un niveau quelconque, il vous est extrêmement rare d'apercevoir des morts, voire même des taches de sang ? Pourtant des centaines voir des milliers de personnes, d'entités et d'animaux meurent chaque jour dans les Backrooms. Comment se pourrait-il que les probabilités de tomber sur un mort soient si faibles dans ce qui s'apparente le plus aux dédales de l'enfer ?
De toute manière, je n'avais personne avec qui énumérer mes nombreuses théories farfelues, car nulle âme ne semblait se poser la question, trop occupées à survivre. Alors j'allais élaborer un plan, découvrir la vérité et la documenter ! Cela me ferait une belle journée remplie d'aventure et de suspense… Je ne le savais pas à ce moment, mais j'allais être servie.
J'avais déjà fait mes recherches et cela n'avait rien donné, il faut donc que je prouve par moi-même mes nombreuses théories. La première étape était de localiser un cadavre, morbide activité. Je suis entrée, sans laisser de traces, dans les communications radios et messageries de nombreux groupes de survivants. La difficulté ne fut pas d'entendre parler d'un mort récent, mais d'une opportunité dans laquelle la position du cadavre serait précise, dans un lieu sûr et que personne ne comptait le récupérer. Cela m'a demandé une grosse heure avant de sentir mordre à l'hameçon, j'ai dû enregistrer la conversation pour la réécouter plusieurs fois et en extraire les informations essentielles. Je tiens à vous partager le document ci-dessous, les informations présentes seront importants pour la suite.
RESUME DES INFORMATIONS RELATIVE AU DECES DE KERRY NEWERS
Aujourd'hui, j'ai appris qu'à 20h29, un forcené provenant probablement d'un groupe de bandits a récupéré une radio connectée directement à un poste radio d'une base du M.E.G. et a menacé de tuer la femme qu'il venait de capturer vivante, qu'il avait pourchassé jusqu'au Niveau 22.
Des négociations ont eu lieu, je n'ai pas réussi à tout suivre vu que le kidnappeur n'arrêtait pas de crier et de paniquer. Mais pour résumer, il demandait à ce qu'on lui amène des rations et "des putains de vêtements chauds" en échange de la libération de son otage. Le M.E.G. refusa.
J'ai coupé au moment où le preneur d'otage a annoncé la nouvelle à Kerry Newers. Une femme d'une cinquantaine d'années d'après sa voix et sa façon de parler. J'ai rallumé plusieurs minutes plus tard. Le tueur était en train de sermonner l'agente du M.E.G. en lui répétant que la mort de la femme était de sa faute, encore et encore. On ne pouvait entendre que les pleurs du meurtrier à la fin de l'enregistrement.
L'information essentielle est qu'une femme d'une cinquantaine d'années a trépassé aujourd'hui à 20h29 à l'étage 6 du Niveau 22 près d'une des sorties se trouvant dans une zone industrielle.
J'aviserai demain sur mon plan, bonne nuit à toi ma Machine (faut vraiment que je te trouve un nom).
Fin du document.
J'ai eu un rêve conscient cette nuit-là. J'ai du mal à m'en rappeler et ça reste très abstrait. La principale chose qui m'a frappée, c'était l'odeur de fleurs semblable à celle du cimetière de mes grands-parents. Je ne m'y connais pas en fleurs, mais cette odeur me faisait penser au chrysanthème. Mon rêve se passait sur une île, une île faite de pierres blanches parfumées par l'odeur des vagues frappant en simultanée toutes les 21 secondes. Au milieu de cette île se trouvait des cyprès blancs. Dessinées dans la pierre de l'île, des trous en forme de porte à l'allure des mausolées égyptiens. Je viens de me rappeler à l'instant d'un détail de ce rêve, le ciel était vide.
J'étais assise en plein centre de l'île. Les fleurs me divertissaient, moi et mon cadavre. Mon cadavre était près de moi, un parfait doppelganger à l'exception d'une peau totalement blanche. Nous discutions via des mots étranges et vide de sens pour moi, je vous partage avec mes souvenirs défectueux nos dires :
« Tu es de couleur neige, Futur m'haine-t-il ?
Les morts ne parlent pas.
Tu parles pourtant.
Et toi tu penses, pourtant tu es déjà morte depuis ton arrivée, tu es mort-vivante.
Les morts ne parlent pas, parles moi plutôt d'Avenir.
Tu seras de pierre, statue flottante.
Eternelle. Qui est la méduse ?
La morte car les cadavres ne sont jamais morts.
Merci du conseil, passeuse blanche à l'air cadavérique voguant vers une île dont l'horizon est une boucle de gris. »
Et voilà. Vous vous demandez l'utilité de ce rêve dans ce rapport ? Je pense, avec énormément de doute, qu'il était prémonitoire. Je ne peux pas ignorer le focus sur les morts et les cadavres qu'avait ce rêve. Peut-être était ce à cause de mon obsession pour la question ou le stress que me causait l'expédition suivante, mais ça reste tout de même étrange. Il m'a semblé pertinent de le mettre ici.
Mon réveil fut délicat. Mes jambes ne voulaient pas quitter ce nid douillet qu'était ma chambre, une petite salle perdue, mais cosy. Après une longue discussion avec moi-même, je pus enfin commencer à préparer mon expédition, aussi terrifiante, soit-elle. La veille, ma Machine produisait les objets que je pensais nécessaire à cette mission — il faut noter que ces objets sont souvent de mauvaise qualité ou instable, rien n'est parfait.
Pour la première fois, je dû me persuader de laisser de côté mon costume bien-aimé et de le remplacer par une combinaison sportive qui me semblait parfaite pour l'occasion. En me regardant dans le miroir, je voyais une femme forte, tenace et agile prête à toutes les épreuves. Je ne savais pas que la queue-de-cheval m'allait si bien. Intérieurement, je me sentais prête, mais mon corps, lui, n'arrêtait pas de trembler de peur.
- π -
Coucou. J'aimerais savoir un truc… Est-ce qu'il t'arrive d'avoir peur ?
bonjour
c'est quoi la peur
Tu sais… Le sentiment que les humains ressentent au bord de la mort ou face à une situation désespérée où les conséquences et les dangers semblent démesurés. Pour résumé, c'est la réaction qu'on a face à la cruauté indifférente de l'univers. Tu arrives à comprendre ?
oui
et oui
je comprends la peur
je ne sais pas si je la connais
peut être
Sérieusement ?! Wow, j'aurais jamais cru que tu pourrais avoir peur… Je veux dire que t'es littéralement un esprit immortel.
il y a des choses pire que la mort
être seul en fait parti
je crois que je n'aime pas être seul
Voyons, ça n'arrivera pas, il y aura toujours des humains pour venir te voir. Merci de ta réponse. En ce moment, j'ai peur et je reste bloquée face à ma porte.
tu as raison d'avoir peur ARIANNE
la peur est nécessaire pour toi
inutile de bloquer dessus
Bien sûr, bien sûr. La peur est naturelle, je ne devrais pas avoir honte de ressentir de la peur face à ma situation. C'est fou comme on peut oublier des choses évidentes dans cette endroit. Merci π, je pense pouvoir y arriver maintenant. Tu ferais un très bon psy d'ailleurs.
c'est quoi un psy
pourquoi je suis un psy
j'ai du mal à te suivre parfois
je ne sais pas ce que tu comptes faire
mais je te souhaite bonne chance
bonne chance ARIANNE
J'avais besoin d'un ami pour me remettre les idées dans l'ordre, pas Iris ni quelqu'un d'autre tout court, ils m'auraient fait la leçon comme des parents à leur enfant. C'est agréable de parler avec π de manière générale, il ne juge pas — il en est incapable de plus — et essaye toujours de comprendre et d'aider.
Le Niveau 22 est à mes yeux allégorie de la mort, le reflet de ce qu'aurait pu être l'humanité ici-bas. Je l'ai toujours trouvé effrayant comme une sorte de musée abandonnée où on y découvre les dérives d'une ancienne société qu'on arrive à peine à s'imaginer. Sans parler des éboulements et de la stabilité du niveau, énormément de vagabonds sont portés disparus dans ce niveau sûrement à cause du manque de repère et des nombreux étages similaires du niveau. J'ai beaucoup hésité à propos de mon expédition ; juste à cause du niveau en lui-même. Pour m'y repérer, j'avais préparé un rouleau de papier toilette à déchirer en morceaux pour laisser des traces de mon passage. J'espérais que cela était suffisant.
On y est, le moment où j'ai franchi la porte de ma chambre. Désolée si ça a prit en longueur, mais j'ai si peu d'occasions d'écrire à des lecteurs assidus (je l'espère.) comme vous. Juste avant de sortir, je récupérai un 9 mm du tiroir, cadeau d'Iris.
J'arpentais les différentes zones, niveaux et sous-niveaux des Backrooms avec une hésitation constante. Je possédais un plan imprimé par ma Machine du chemin que je devais prendre, il était vague, mais c'était la seule chose que j'avais sous la main. Malgré ma phobie, je n'hésitais pas à saluer avec timidité les vagabonds que je croisais. Avec certains, nous échangeâmes des ressources, informations ou de simples salutations. Avec d'autres, je ne pouvais me permettre de me montrer à eux, souvent dû à leur silhouette hostile et à leur comportement. Je n'eus pas à fuir ou à affronter quelconques entités, je les avais évitées,je m'en étais cachée soigneusement grâce à ma carte et aux renseignements de mes confrères.
Arrivée au Niveau 22, je découvris que l'entrée que je comptais utiliser était scellée par un éboulement du niveau en lui-même - fréquent, mais je n'en savais rien à ce moment-là. Ma localisation était le Niveau 817, il y a mieux. Des membres de la base “Junkyard Dogs” présents dans le niveau m'ont fait sursauter de peur lorsqu'ils m'ont trouvée devant ce tas de pierres. Leurs comportements étaient étranges, ils semblaient très agressifs tout en étant attentionnés envers moi. Vous vous en doutez, je n'ai pas réellement discuté avec eux pour deux raisons. Première raison, ils m'avaient prise au dépourvu sans me laisser le temps de me préparer à une interaction sociale. Deuxième raison, ils adoraient parler. Beaucoup parler. Mais vraiment beaucoup. Je vais vous décrire le long monologue du "chef" de l'escouade qui m'a découverte.
« Bonjour jeune fille ? Qu'est-ce qui t'amène ici ?… On est pas trop parlote, d'accord. Désolé, on a sûrement dû te faire peur à venir en groupe de 3. C'est juste que lorsqu'on m'a signalé une gamine en tenue sportive avec un sac chargé comme celui d'un soldat, ça m'a titillé le petit doigt. Ne t'inquiète pas, on te veut aucun mal bien au contraire. T'as l'air perdue face à ce caillou… J'imagine que tu voulais entrer dans le Niveau 22. Ça s'est effondré depuis un moment c'te entrée. Mais… arf je sais pas si j'ai le droit de te le dire. Allez, soyons fous ! Qu'ils aillent se faire foutre ses bureaucrates et leurs missives. Juste là-bas — Dit-il en pointant du doigt une mine perdue au milieu du désert — C'est l'entrée que tu cherches et qu'on a construite spécialement pour nos… expérimentations. T'as l'air d'être bien équipée donc je te fais confiance pour pas crever là-bas, sinon ça nous revient dans le cul ma petite. Bon allez ! Décampe d'ici. On reste près d'ici à chercher de la casse, viens nous voir si besoin. »
Après cette chaleureuse "discussion", je me dirigeai vers le point indiqué. Il me fallut plusieurs minutes pour soulever la lourde ouverture en bois de la mine. L'intérieur de la mine était sombre comme l'abysse, elle regardait en moi à son tour. Je pris quelques minutes pour m'équiper d'une lumière frontale, de gants et d'une bandoulière où j'y attachais un de mes piolets d'escalade. La traversée me mettait en tension, le piolet me fut utile pour libérer le chemin construit de manière hasardeuse mais étonnamment solide. Voici une photographie que j'ai prise de ce passage, juste pour pouvoir le montrer à Iris.
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La sortie de cette mine était indiquée par une porte en tôle avec un panneau éboulement dessus, original. J'empruntais la sortie puis je montais une petite pente qui m'envoya directement dans l'un des parkings du niveau, je n'avais aucune idée de l'étage en question. Je vagabondais dans ce parking transformé en lieu de vie via de nombreuses tentes d'habitation, des cuisines improvisées, un grand atelier en extérieur ainsi qu'une clinique. Bien sûr, tout ça a été dévalisé. Je me sentais en plein urbex, mais avec des monstres bien réels, pas de ceux qui font claquer les fenêtres.
Plus loin, je trouvais une base plus développée et militarisée avec des documents traînant un peu partout et des bureaux en désordre. Une sorte de point de contrôle. J'y trouvai aussi un squelette, endormi sur son bureau. Ma langue se retenait d'interroger ce tas d'os, peut-être aurai-je reçu la réponse que je désirais. Il fallait dire aussi que je me sentais moins seule près de cet être rongé par le temps. Dans cette base, donc, on y faisait mention souvent du nombre 11 ainsi que de l'étage 11. Les documents étaient difficiles à lire, souvent déchirés ou l'encre disparue. Si je faisais confiance aux documents, je me situais à l'étage 11 à 5 étages de mon objectif. En tournant sur moi-même, la seule option pour descendre vers les étages inférieurs se trouvait être un escalier, effondré.
J'admire l'inventeur de la corde d'avoir réussi à transformer un si fragile matériau en un objet si résistant. Accrochée à un pique, la corde me permit de descendre de 2 étages impraticables par le trou béant qui était censé être un escalier, à une époque. Étage 9, un vrai dépotoir, l'odeur y était atroce et j'accourus vers une sorte d'ascenseur de fortune que j'activai avec panique. J'aurais pu y passer à ce moment précis, l'ascenseur aurait pu lâcher et me faire tomber je ne sais où avec les jambes fracturées. Au final, rien de tout cela. Il m'emmena au 7e étage, étage que j'avais choisi dans la confusion. Je finis donc à l'étage souhaité. L'angoisse me prenait la gorge.
Il s'agissait d'une immense usine en intérieur, des ateliers tous les mètres pour tout type d'outils, ressources ou vêtements. C'était aussi la première fois que je voyais autant de squelettes en même temps, il y en avait quasiment pour chaque poste comme s’ils avaient décidé de travailler jusqu'à la fin. Je connais la base de l'histoire de ce niveau, mais je ne m'attendais pas à une ambiance aussi sinistre. J'avançais parmi les postes de travail en esquivant les squelettes le plus respectueusement possible. Ma lumière frontale ne suffisait pas alors je sortis une puissante lampe-torche et continuer mon chemin en me retenant de trembler. C'était un sacré défi.
En plein milieu de la réserve, se trouve un cadavre. Une femme d'une soixantaine d'années à la peau blanche et les veines bleues ressortant. La décomposition avait commencé, mais l'odeur était supportable. Je m'accroupis vers elle pour vérifier son état. Une balle lui avait transpercé la gorge et en est ressorti. Ses yeux vitreux fixaient le plafond misérable espérant peut-être rencontrer le regard de Dieu. Je posai ma main sur ses yeux pour les refermer sans abîmer son expression de martyr. Je me relevai avec une respiration étouffante. Je me tenais là face à elle. Une pensée me traversa.
- Je fais quoi maintenant ?
J'installais des petits projecteurs aux murs encore stables pour illuminer le corps. Plus loin, je décidais de m'installer dans une tente avec une vue directe sur ma cible. Je sortais mon sac de couchage ainsi que mon déjeuner. Je manquais de force après cette aventure, ma réserve ne fit pas long feu. Le ventre plein, mon cerveau put élaborer un plan : m'endormir en éteignant les projecteurs et installer un piège sonore autour du cadavre. Il y avait de quoi faire dans cet atelier, j'aurais pu construire une arme de guerre avec toutes ces camelotes. Via une corde, du ruban, différents objets métalliques et d'autres bricoles, j'ai réussi à établir une zone autour du cadavre. Cette zone était un piège d'un rayon de 3 mètres avec le cadavre de Kerry Newers en son centre. Si le piège détectait quelqu'un ou quelque chose le traversait alors un bruit strident et métallique résonnerait à travers tout l'étage, de quoi me réveiller en sursaut me permettant ainsi d'activer les projecteurs à distance via une télécommande.
Le sommeil m'emporta délicatement malgré l'inconfort de mon lit et l'odeur désagréable de l'étage. Le piège était paré, la télécommande dans ma main, le cadavre à sa place, je n'avais aucune raison d'être anxieuse. Le rêve dont je vous avais parlé plutôt, il m'est revenu, moins cristallin cette fois. L'île était toujours là, ma jumelle aussi, mais avec une invitée — Kerry Newers — qui discutait avec nous comme des amis d'enfance. Nous avions chacun un café à la main. Le mien était cacaoté à la limite du chocolaté avec une crème de lait de coco sucré. La discussion de ce rêve s'est perdue au fin fond de mon esprit malgré ça, je me souviens bien d'une phrase qui revenait souvent. Les cadavres ne sont jamais morts. Ce rêve se finit par une sorte d'encouragement de la part de mes compagnes. Je me relevai ardemment avant d'embarquer dans un petit bateau en bois m'envoyant à la dérive jusqu’à ce qu'une énorme créature de métal s'élançât en dehors de l'eau avec son cri strident qui me fit saigner des oreilles.
Le cri monstrueux de mon rêve se transforma en un vacarme métallique qui me sortit de mon sommeil. J'avais dû m'endormir une bonne dizaine d'heures. J'activai, après quelques secondes d'incompréhension, la télécommande des projecteurs. Une lumière vive m'aveugla, les projecteurs étaient plus puissants que prévu. Je m'accroupis contre un rebord pour recouvrir la vue en sécurité. Une fois calmée, je jetai un coup d'œil à mon piège. J'espérais faire face à un humain, une entité ou un animal. Il y avait aussi une chance que je rencontre la Mort, le Diable peut être voire Dieu lui-même. Rien de tout cela, malheureusement. Ce que je vis me hante encore aujourd'hui. Je suis incapable de rapporter à nouveau ce que j'ai vu. Cependant, j'ai écrit à mon retour chez moi pour libérer ma conscience. Voici le texte.
Qui ramasse les morts ?
La réponse est simple, personne. Mon plan a fonctionné. Cachée derrière un rebord, j'ai pu admirer la vérité à l'acte.
Illuminée par les lumières divines des projecteurs, se tenait en face de moi Kerry Newers sur ses deux jambes. Son regard ne fixait rien à part l'abysse du Niveau 22. Elle avança un pied puis l'autre dans une dance inhumaine, robotique et indifférente à ce qui l'entourait. Mes yeux ne pouvaient lâcher du regard cet être surnaturel, même pour les Backrooms. Je me sentais gamine. Une gamine qui admirait un fantôme pour la première fois. Elle ne m'avait pas remarquée ou elle m'ignorait, mais dans tous les cas elle ne s'arrêta pas dans son chemin vers l'Au-Delà.
Par réflexe ? Par peur ? Par stupidité ? J'ai sorti l'arme accrochée à ma ceinture. Je visais ses jambes, je la voulais pour moi. Je voulais la capturer, l'étudier, découvrir son secret. Mon bras tomba devant la beauté sinistre de la scène, je ne pouvais gâcher la transcendance de cette femme par pur égoïsme. Je m'en aurais voulu à vie.
Elle continua sa marche archangélique et s'enfonça dans les ténèbres sans que je ne puisse rien n'y faire. Je restai figée pendant plusieurs dizaines de minutes. Ma compréhension de la vie et de la mort venait d'être réduite en morceaux face à la vérité indéniable de la Mort.
Personne ne ramasse les corps. Nous sommes notre propre Faucheuse. Au final, Les cadavres ne sont jamais vraiment morts.
- Arianne "La Diplomate" Elster
Je vous remercie d'avoir eu le courage de lire jusqu'au bout mon histoire. Après cette découverte, je suis allé étudier la question avec le Professeur Néhémias, seul homme de science que je connaissais. Je vous laisse la décision de rendre ces informations publiques ou non. Quelque soit votre décision, les conséquences vous rattraperont et votre conception de la vie et de la mort sera altérée à vie. Adieu.